Céleste Mogador

Céleste Mogador

Je me décris comme une bidouilleuse, entre plasticienne et artisane. J’ai appris à broder seule, de manière empirique, sur le tas. J’aime le jeu de l’aiguille qui entre dans l’étoffe. Je fais, je défais, je recommence et je m ‘améliore. Tout ce que je fais part d’erreurs. Autant je peux être speed et impatiente dans la vie quotidienne, autant je fais preuve de persévérance dans ma relation aux matières et aux savoir-faire techniques. La broderie est mon anxiolytique manuel : je brode jusqu’à l’oubli de soi. Cette activité de remplissage point par point, comme une forme de pointillisme, m’empêche de réfléchir. Mon esprit s’apaise et je redeviens sereine. Certains jouent au sudoku, d’autres font du jogging ou du yoga, moi je brode. Ma pratique est très éloignée du design froid et minimaliste.
photo celeste salle
chaussures
Je revendique un retour aux belles choses, aux matières nobles, à de jolies pièces qui durent et se transmettent. 
Less is more. Il faut acheter moins, plus cher mais mieux. Née au cœur de la Bretagne, nourrie de la richesse de la culture bretonne, et vivant depuis toujours en Bretagne, j’ai baigné dans l’ancienne tradition de costume brodé, comme la broderie Glazig et la broderie bigoudène. J’aurais rêvé de suivre les cours de l’Ecole de broderie d’art de Quimper animés par Pascal Jaouen. Dès l’âge de 18 ans, j’ai commencé à broder des motifs d’arêtes de poisson. Puis j’ai appris des points de broderies spécifiques du patrimoine breton comme le Dren-Pesk, un motif décoratif en forme d’arête de poisson qui orne les costumes des Bigoudènes. Mais je veux sortir des images d’Epinal de la Bretagne bretonnante. Je veux montrer qu’il y a autre chose. La Bretagne est une région dynamique avec beaucoup de créativité et d’initiatives. Mes broderies sont un retour aux sources de la tradition mais en version rock. J’ai ainsi créé un kabig revisité avec des motifs brodés de plongeuses.
 Le thème de l’œil tout comme celui des cartes à jouer sont les fruits d’un hasard qui a bien fait les choses. Je travaille au feeling, toujours en recherche de thèmes. Ceux là sont très graphiques, presque comme des panneaux signalétiques. Ces bijoux sont des porte-bonheur pour lutter contre les esprits malins ; ils sont porteurs d’espoir et d’avenir. Mais je n’ai pas envie de n’être que « Bretonne ». La broderie existe partout et dans toutes les cultures. Nos nouvelles marques Céleste Mogador et Eté 36 se positionnent sur un créneau lifestyle et haut de gamme. Elle comprend du prêt-à-porter de luxe, des bijoux en pièces uniques, des accessoires, de la papeterie et aussi des carreaux de ciment. Je veux amener mes motifs sur des supports différents dans le cadre de petites collections. Je vais aussi travailler avec une communauté de femmes brodeuses au Rwanda pour développer une démarche qui allie la dimension éthique et le chic. Il y a une jolie histoire à raconter.
Pascale
Pascale Nivet-Bernetière, née à Carhaix au cœur de la Bretagne, vit et travaille à Rennes. Avec son époux Fabrice Bernetière, cette créatrice autodidacte et illustratrice sous le nom de Melle Héloïse est la co-fondatrice en 2004 de la marque de papeterie et d’accessoires de décoration La Marelle. En 2014, elle lance la marque lifestyle Eté 36 et en 2016, Céleste Mogador dont elle assure la direction de la création et réalise des broderies librement inspirées de la tradition bretonne.

- Interview de Céleste Mogador par Marie Jo Malais pour le cahier de tendance House of Game de la session Maison & Objets septembre 2016 -